◭ bois ton candy'up et fait pas chier. « Comment ça s'est passé aujourd'hui ? » A neuf ans, on ne sait jamais trop quoi répondre à cette question. Surtout qu'à cet âge là, les enfants se font rarement des cadeaux entre eux. Et qui ne sait pas que mon père n'est pas toujours là pour m'accueillir chaque soir lorsque je rentre chez moi ? Qui ne sait pas que je ne connais pas les délices d'une tendresse paternel ? « Comme d'habitude. Louis m'a dit que j'étais nulle parce que je n'avais pas de père. » Ma mère commence à s'approcher, tendant les bras vers moi. Farouche, je m'éloigne. Et je vois quelque chose se briser dans ses yeux, mais je n'identifie pas ce qu'il se passe tout de suite. Parce que je ne comprends pas, ou ne veut plus comprendre ma mère, seule, qui fait semblant de s'intéresser à moi alors qu'elle meurt certainement de chagrin que son mari parte si souvent. « Ton père fait ça pour nous tu sais. » Je pose mon sac sur la table, j'ai envie de renouer le contact avec cette mère absente, mais je ne peux pas. Parce qu'elle m'abandonne elle aussi. A chaque déménagement, elle est un peu plus distante. Le fossé se creuse. Elle est si faible. « Je m'en fiche de ça. Je lui ai dit que je préférais ne pas avoir de père qu'un père qui me cogne dessus. » Comme je vous l'expliquais, à cet âge là, les enfants ne se font pas de cadeau entre eux. C'est à cet instant que ma mère se rend compte de la morsure sur mon épaule et mon œil légèrement enflé. Comme si c'était la première fois que je rentrais à la maison avec quelques bleus. Comme si c'était la première fois qu'elle en voyait sur moi. Je suis sans doute la petite fille la plus turbulente de la classe. Les autres filles, elles jouent à la corde à sauter ou à la marelle. Moi je me bat avec les garçons. « Tu t'es battue ? Oh Houna... » Je me met automatiquement à pleurer. L'absence de mon père se fait beaucoup trop lourde pour mon petit coeur. Je voudrais qu'il soit là, qu'il me dise que je suis merveilleuse, que je suis belle, qu'il m'achète une nouvelle robe, qu'il me caresse le front pour m'aider à m'endormir, qu'il me protège d'une chute à vélo. Mais il n'est pas là. Et il y a cette femme, ma mère, avec la gifle un peu trop facile, la voix qui s'élève trop vite lorsque quelque chose la contrarie. Et puis personne, personne pour me rappeler que j'existe. Je me rend compte qu'au final, je suis comme Louis. Sauf que je n'ai pas de mère qui tente de me protéger, parce que la seule personne qui le pourrait et incapable de voir plus loin que son propre chagrin. « Est-ce qu'on jour on arrêtera de déménager ? » Ma voix est suppliante, apeurée, tellement touchante que ma mère n'ose pas me dire la vérité, le fond de sa pensée. « Bien sûr, il faudra que l'on trouve un endroit où vivre, mais oui, on arrêtera. » Mensonge. Après cette discussion, nous avons encore. ◭ une autre ville, encore et encore. ▷ Je déteste Londres. Sincèrement. Il pleut sans arrêt. C’est en continuité, variant de la pluie fine au torrent et je déteste ça. Je suis tout le temps enrhumé, je n’ai qu’une envie c’est quitter cette endroit et retourner à Chicago. Mon père dit que l’ont va bientôt déménager mais je commence à le connaitre, ce n’est certainement pas pour retourner dans ma ville natale. Tout me manque là bas. Surtout Evan. Celui qui a été mon voisin durant 8 ans me manque. Je viens d’avoir 9 ans et pour la première fois de ma vie, je comprends le sens du mot « manque » et ça ne me plait pas du tout. C’est bizarre quand on a 9 ans de comprendre quelqu’un ne fera peut-être plus jamais parti de votre vie. Mais selon mes parents, j’allais rapidement oublier ce petit brun qui vivait à côté de chez moi. Comme si c’était possible d’oublier quelqu’un d’aussi gentil. Au moins lui, il comprenait ce que je ressentais. Je n’avais pas besoin de faire croire que déménager c’était le truc le plus cool de la terre alors que ce n’était franchement pas le cas. Je n’ai jamais menti à Evan et en vérité, ça a brisé mon cœur de petite fille de le quitter. Tout parait si rose à 9 ans. Avoir un petit amoureux, c’est mignon. Et devoir le quitter parce que votre père en a l’obligation, c’est douloureux. Enfin, on n’a pas le cœur brisé et on s’en remet rapidement, mais ça nous fait quand même drôle. Et puis franchement, je déteste l’idée même d’être à Londres. Loin de tout ce que j’ai toujours connu. Je déteste cet endroit. Et si je continue à le répéter à tord et à travers à qui veux bien l’entendre, je suppose que mon père comprendra le message et demandera une mutation. Et pour une fois, c’est absolument tout ce que je souhaite. ▷ Alors que je viens de passer 3 ans à Londres, nous venons à présent d’emménager à Pasadena. Au moins ici, il fait beau et du haut de mes 12 ans, je suis capable d’en demander beaucoup. On me l’accorde car je fais ce qu’il faut pour. Pour l’instant, il parait que je suis encore une enfant et que mes caprices vont se calmer. Si mes parents savaient, je crois qu’ils ne jureraient pas si vite. Ils me font vivre un enfer, et bien, je vais leur rendre la pareille. Chicago c’est l’endroit où j’ai envie d’être. Mes désirs. Qu'ils cèdent surtout à ses derniers. Peut-être savaient-ils comment me motiver aussi. Céder à mes caprices et mes désirs afin de me faire comprendre que si je voulais continuer à avoir tout ça, je savais ce que je devais faire. Peut-être que le pire dans cette histoire, c'est que je n'ai pas marché. J'ai couru. J'aurais fait n'importe quoi pour qu'ils soient un peu fiers de moi. Ou plutôt qu'ils fassent attention à moi. Mon père était toujours en mission à droite à gauche et ma mère avait toujours un dossier super urgent à traité. Moi j'étais ballotté de nourrice en nourrice à qui je rendais la vie impossible par simple esprit de vengeance. Pourquoi ? Parce que je voulais juste de l'attention moi. Et à part cette femme presque inconnu, personne ne m'en donner. Et j'étais assez capricieuse pour n'en vouloir que des deux personnes qui n’étaient pas capable de m'en donner. Mais alors, qu'est-ce que je foutais ici hein ? Pourquoi est-ce qu'ils avaient gardé un enfant dont ils ne se préoccupaient plus maintenant ? ▷ souhait numéro un : exaucé. Adieu Pasadena. Deux ans dans cette ville et maintenant, me revoilà à Chicago ! J'ai grandis à Chicago, qui restera toujours la ville que j'aime le plus au monde. Que je connais sur le bout des doigts. Chicago c'est chez moi, c'est l'endroit où j’élèverais mes futurs enfants. Je n'aurais pas pu imaginer meilleur endroit pour grandir. Malheureusement je n'y ai passé que les huit premières années de ma vie et pourtant, c'est l'endroit où j'ai toujours eu envie d'être. Pour moi. Pour retrouver Murthag. C'est vrai, j'ai eu des parents durs, et j'étais sans doute pourri gâter en contrepartie. Mais alors que je pensais être heureuse de retrouver ce garçon dont j’avais été bizarrement amoureuse toute mon enfance, je n’ai pas emménagé dans mon ancienne maison. Et puis il avait ce jeune garçon, répondant au nom trop mignon de Maë. J'avais 14 ans moi et jamais vraiment eu de petit copain. Maë... Si j'avais su, je crois qu'on aurait évité de s'engager ensemble. Si tôt. Si jeune. Quand on ne sait pas encore bien qui on est (sexuellement parlant j’entends). Les choses se sont passés un peu naturellement. Sauf qu'au moment fatidique de la première fois... rien du tout. Parce qu'accrocher vous bien comme il faut à vos sièges, monsieur a comprit à cet instant précis qu'il était gay. Alors je ne sais pas vraiment si je dois comprendre que c'est moi qui l'est rendu gay ou s'il l'a toujours été mais c'est... franchement bizarre et déroutant. Et aussi bizarre que ça puisse paraitre, c'est quand même resté cool entre nous. De toute façon j'avais pas beaucoup d'ami à l'époque alors bon, j'ai préféré que Maë reste dans ma vie. Certes c'était assez étrange après avoir été en couple avec lui de n'être que son ami et surtout d'accepter qu'il soit gay (que je l'ai rendu gay...). Donc bon. Puis finalement, j'ai déménagé. Encore. Et beaucoup trop vite à mon goût. ▷ L'AUSTRALIE PUTAIN ! On m’a prit pour une putain de koala, un putain de kangourou ou comment ça se passe là ? Non mais vraiment ? VRAIMENT ? Mes parents ont cru quoi là ? Quitter Chicago une nouvelle fois alors que pour une fois, j’avais réussi à me faire deux ou trois amis sincères et sympa. Sérieux. Je déteste ma vie. Je déteste mes parents. Et sa mère la caissière, j’allais bien leur faire comprendre. C’était trop pour moi cette fois. Ma vie de famille n’a jamais été celle que j’aurais voulue. Et si j’ai fait tout ça, sortir alors que je n’avais que 16 ans et agir comme si j’étais adulte, c’est sans doute car j’avais toujours eu la position d’une enfant chez moi, à qui on ne demandait jamais l’avis. J’étais là, sans y être. Alors, quand sur une piste de danse on me remarquait, dans ma fabuleuse robe du soir, eh bien, ça me faisait du bien. Et je me laissais aller à toute sorte de plaisirs… Tous ceux que l’on interdit à un enfant. Savoir que l'on faisait assez attention à moi pour m'aborder, malgré mon visage poupin... C'était être un peu adulte. Et surtout... Fréquenter des hommes plus vieux faisaient enragé mes parents et à l'époque, leur rentre la monnaie de leur pièce, c'était tout ce que je voulais. On ne pouvait pas me laisser dans ma chambre et faire comme si j'avais toujours quatre ans, partir, déménager, sans savoir si j'avais un petit bout de vie ici. Non... On ne pouvait pas. Et j'étais décidée à faire de la vie de mes parents, un enfer. ◭ avec l'insomnie plus rien n'est réel. Tout est une copie, d'une copie, d'une copie. Et je crois que j'ai plutôt bien réussi tout ça. Un an plus tard tout juste, voilà que mon père redemanderait Chicago et que miraculeusement, il obtint le poste (ou à grand renfort de pistonnage et d'argumentation à propos de la personne déplorable que j'étais en train de devenir.) J'étais tout à coup quelqu'un de suffisant et particulièrement exécrable. Seulement voilà, me faire revenir à Chicago ça n'allait rien changer. Plus rien n'allait être comme avant maintenant. J'étais une autre. Obsédée par la manipulation d'autrui, j'étais devenue maitresse dans l'art de concevoir des plans plus ou moins sans faille. Mon modèle dans la vie ? La perfect bitch et pourtant personnage fictif : Blair Walford. La reine des abeilles régnant sur son petit monde à la baguette. Dotée d'un certain charisme naturel et d'une autorité génétique, tout m'était ainsi plus simple. En étant aussi dure avec moi, mes parents m'ont forgé un mental assez solide pour supporter la compétition, mais surtout, être capable d'écraser mes ennemis sans ciller et c'était plus facile de ne pas avoir de remord pour la moindre chose que je faisais. C'est toujours le cas d'ailleurs. Je ne vais pas aller jusqu’à vous dire que je suis la perfection incarnée, mais disons que malgré tout ce qui a pu m’arriver, les coups foireux avec des gars un peu étrange parfois et bien je me porte comme un charme. Enfin, c’est que je croyais. Jusqu’à que l’insomnie décide de faire son apparition dans ma vie. Loin des manigances australiennes, je n’avais plus de quoi faire des plans. Et puis surtout depuis un an que je suis revenue à Chicago, j’ai franchement du mal à me faire des amis. Tout ça conjuguer avec l’ennui et stress et voilà que je me retrouve à ne pas pouvoir fermer l’œil. Et puis il a eut ce petit groupe de jeune qui m’a fait me demander pourquoi la folie semblait encrée autour de moi. Et c’est comme ça que Dare or not Dare est entrée dans ma vie. Et ça n’aurait jamais pu être mieux. C’était le bon moment, j’ai crée un profil, commencer à faire quelques défis facile et c’était parti : l’adrénaline vibrait dans mes veines et bon sang ! je redormais. Enfin le sommeil frappait à ma porte à chaque fois que je décidais de m’écrouler enfin sur mon lit. Le pied total. Je n’ai jamais aussi bien dormi que depuis que je fais ce truc. C’est l’pied. Puis y’a Evan. Tout à coup il était là. De nouveau dans ma vie. Basse en main, garage pour seul studio de répétition, me voilà à me présenter pour faire parti d'un groupe. La peur au ventre de ne pas être accepté parce que je ne joue pas assez bien, parce que je ne suis pas assez jolie, pas asse maigre, pas assez tout quoi. Puis faut dit que j'ai pas beaucoup d'ami, je ne connais presque personne alors je ramenerais pas beaucoup de gens si on doit faire des concerts. Après c'est sur que niveau emploi du temps pour les répétitions, ça ira très bien. Je lève les yeux un instant et fixe le garçon au milieu de la table. Il y a quelque chose que je connais dans ce regard. Un truc que je reconnaitrais entre mille mais là... ben là j'arrive pas à mettre le doigt dessus. Lui, si. « Houna ? » La dernière fois qu'on s'est vu, il avait 11 ans, moi 8. Et là, au milieu d'un garage, il reconnait mes grands yeux noissettes et ditingue derrière mes traits tirés de fatigue et mes grandes cernes, la jolie poupée qui l'a quitté sans avoir réellement le choix. « Ev... Evan ? » Je papillonne des yeux, il est... waw ! C'est dingue ! Où est le garçon de 11 ans, un peu potelé que j'ai eu le coeur brisé de quitté quelques années plus tôt ? Qui est ce garçon tatoué avec les cheveux presque long et son sourire en coin sexy de chez torride mais à la bouille encore enfantine quand même ? « T'es de retour? » « Faut croire. » J'ai peur qu'il me demande pourquoi je l'ai quitté, pourquoi je ne l'ai pas prévenu. Mais j'vois dans ses yeux qu'il va rien faire. Je comprend encore qui il est et ce qu'il ressent. Ca me va. « Tu vas jouer quoi? » Je ne répond pas. Je me lane dans Creep, corps et âme, parce que tout à coup, tout dépend de cette audition. Retrouver Evan c'est la meilleure chose qui pourra jamais m'arriver. Avec lui, ça sera facile. Tout sera plus simple et mon dieu, j'aurais un ami, un vrai. Improvisation. « Parfait. On t'appelera. » Je fais un sourire timide et je commence à tourner les talons. J'entend quelqu'un courir, je m'arrête pas. Il a le souffle court et je souris. Je m'arrête brusquement, il me fonce dedans. C'est drôle. « Houna, c'est ok tu rentres dans le groupe. » Je dépose un baiser sur le coin de sa lèvre, grand sourire provocateur. « Tu m'as manqué Evan. » Et j'me sauve.